- ANAMNÈSE
- ANAMNÈSEANAMNÈSEIssu des mots grecs ána (remontée) et mnémè (souvenir), l’anamnèse signifie rappel du souvenir. Pour Platon, elle est la restauration de l’idée contemplée, avant l’incarnation, par l’âme humaine dans le ciel des idées et dont le souvenir serait resté inconscient sans l’opération de la «réminiscence». Aristote refuse cette conception de la theôria et fait de l’anamnèse la faculté, propre à l’homme, de rappeler volontairement un souvenir d’origine empirique et de le localiser dans le temps. La mnémè passe ainsi de la potentialité à l’état d’entéléchie.C’est à la langue philosophique que les médecins ont emprunté le terme d’anamnèse pour désigner cette partie de l’enquête diagnostique qui reconstitue le passé de la maladie en ayant recours à la mémoire du malade et, par extension, à sa documentation et aux indications données par l’entourage. Comme une maladie s’inscrit toujours dans une histoire pathologique et physiologique totale, l’anamnèse doit explorer aussi bien les antécédents personnels du malade que ses antécédents héréditaires, c’est-à-dire parentaux.Le renouveau de la médecine hippocratique et le mouvement psychosomatique ont valorisé depuis un demi-siècle cet aspect de l’acte médical, mais c’est surtout avec la psychanalyse qu’il s’est souverainement imposé, puisqu’on a pu dire que la psychanalyse est une anamnèse prolongée. Si, en effet, le médecin ordinaire se contente de quelques renseignements factuels, le psychanalyste, lui, a forgé un instrument qui oblige le patient à ramener à sa conscience claire et vécue des souvenirs insconscients; et, si l’anamnèse ne suffit pas à la guérison (due plutôt à l’analyse du transfert et aux abréactions), il n’empêche que, tout au long de son déroulement, la cure est un rappel indéfini, patient, méfiant, critique et rusé de souvenirs que le sujet croyait et voulait perdus.Dans la psychanalyse inspirée de Carl Gustav Jung, l’anamnèse découvre des «archétypes» qui n’appartiennent plus à l’individualité du patient, mais à l’inconscient collectif. En parapsychologie, d’inquiétantes et suspectes anamnèses, obtenues par hypnose, remontent très haut dans la vie du sujet et prétendent même extraire du tréfonds de l’âme des souvenirs de vies antérieures.• 1908; « rétablissement de la mémoire » 1831; aussi anamnésie 1843; gr. anamnêsis1 ♦ Psychol. Évocation volontaire du passé; spécialt Renseignements fournis par le sujet interrogé sur son passé et sur l'histoire de sa maladie. — Adj. ANAMNESTIQUE [ anamnɛstik ]. Données, signes anamnestiques.2 ♦ (1907) Liturg. Partie du canon qui suit la consécration, constituée par des prières à la mémoire de la Passion, de la Résurrection et de l'Ascension.anamnèsen. f. LITURG CATHOL Prière de la messe qui suit l'élévation et qui rappelle la passion, la résurrection et l'ascension du Christ.⇒ANAMNÈSE, subst. fém.A.— LITURG. Prière qui, dans la messe, suit la consécration et rappelle le souvenir de la Rédemption.Rem. Attesté ds Lar. 20e, MARCEL 1938, Lar. encyclop., QUILLET 1965.B.— MÉD. (psychol., psychanal.). Reconstitution de l'histoire pathologique d'un malade, au moyen de ses souvenirs et de ceux de son entourage, en vue d'orienter le diagnostic; les données de cette reconstitution. Synon. anamnestiques :• Elle [la psychanalyse] a vu la nécessité de relier l'explication à l'histoire et aux significations accumulées dans le sujet individuel : l'anamnèse recherche dans le cours tumultueux des effets les thèmes directeurs et, derrière les thèmes, les événements individuels qui, chaque fois, ouvrent le sens d'une situation psychologique donnée.E. MOUNIER, Traité du caractère, 1946, p. 45.Rem. Entrée double ds LITTRÉ-ROBIN 1865, anamnèse, anamnésie.Prononc. ET ORTH. :[
]. GUÉRIN 1892 écrit anamnése.
Étymol. ET HIST. — 1. 1865 pathol. (LITTRÉ-ROBIN); 1908 psychanal. « évocation du passé » (Encyclop. univ. du XXe ds Fr. mod. t. 37, p. 348); 2. 1907 théol. (F. CABROL et H. LECLERCQ Dict. d'archéol. chrét. et de liturg., t. 1, col. 1880 : Anamnèse [...] Le mot[...] n'a été qu'assez récemment appliqué en liturgie, à cette partie de la messe qui suit la consécration et qui, dans les liturgies grecques, commence assez souvent par les mots
[« nous souvenant donc »] C'est l'Unde et memores de la messe romaine).
Empr. au gr.« action de rappeler à la mémoire » d'où « souvenir » (PLATON, Phœd. 72 e ds BAILLY); au sens 2 sert de doublet à anamnésie.
STAT. — Fréq. abs. litt. :3.BBG. — Archéol. chrét. 1924. — Foi t. 1 1968. — FOULQ.-ST-JEAN 1962. — GARNIER-DEL. 1961 [1958]. — LAFON 1969. — LAL. 1968. — LITTRÉ-ROBIN 1865. — MARCEL 1938. — Méd. 1966. — Méd. Biol. t. 1 1970. — MUCCH. Psychol. 1969. — PIÉRON 1963. — Sexol. 1970. — SILL. 1965.anamnèse [anamnɛz] n. f.ÉTYM. 1908; « rétablissement de la mémoire », 1831; aussi anamnésie, 1843; grec anamnêsis, du rad. de mnêsis « mémoire ».❖♦ Didactique.1 Méd., psychol., psychan. Renseignements fournis par le sujet interrogé sur son passé et sur l'histoire de sa maladie.1 Si nous portons maintenant notre regard à l'autre extrême de l'expérience psychanalytique, — dans son histoire, dans sa casuistique, dans le procès de la cure, — nous trouverons à opposer à l'analyse du hic et nunc la valeur de l'anamnèse comme indice et comme ressort du progrès thérapeutique, à l'intrasubjectivité obsessionnelle l'intersubjectivité hystérique, à l'analyse de la résistance l'interprétation symbolique.J. Lacan, Écrits, p. 254.♦ Par ext., littér. Évocation volontaire du passé.2 Un jour, je me souviendrai de la scène, je m'y perdrai au passé. Le tableau amoureux, à l'égal du premier ravissement, n'est fait que d'après-coups : c'est l'anamnèse, qui ne retrouve que des traits insignifiants, nullement dramatiques, comme si je me souvenais du temps lui-même et seulement du temps (…)R. Barthes, Fragments d'un discours amoureux, p. 257.2 (1907). Liturgie. Partie du canon qui suit la consécration, constituée par des prières à la mémoire de la Passion, de la Résurrection et de l'Ascension.❖DÉR. Anamnestique.
Encyclopédie Universelle. 2012.